Accueil Les livres commentés Détails - L'art français de la guerre

Les derniers livres commentés

La nuit s’ajoute à la nuit – Ananda Devi – Stock
Ceux qui restent – Benoît Coquard – La Découverte
Les détectives sauvages – Roberto Bolaño – Gallimard
     traduction Robert Amutio

lors de la rencontre du 12 novembre 2024

 

Les prochaines lectures

Le fantôme de la banquette arrière – Jan Carson
     Sabine Wespiesertraduction Dominique Goy-Blanquet
Thomas Helder – Muriel Barbery – Actes Sud
Les vagues – Virginia Woolf – Bruit du temps
     traduction Cécile Wajsbrot

pour le club de lecture du 7 janvier 2025



Tous les livres commentés

Ouvrage 

Titre:
L'art français de la guerre
Auteur:
Jenni (Alexis)
Edition:
Gallimard
Réunion du:
25.10.2011

Commentaire

lartfrancaisdelaguerre

Notons tout de suite que pour ce premier roman Alexis Jenni est dans la liste des 4 derniers écrivains en lice pour le Goncourt [obtenu depuis] et que, heureuse coïncidence, il sera reçu demain à la librairie Quai des Brumes. C'est la première fois que les lecteurs pourront rencontrer l'auteur dans la continuité de leur débat sur son livre.

 

Un jeune homme qui s'est volontairement marginalisé rencontre par hasard un vieux militaire dans un bistrot. Il demande à ce dernier de lui raconter ses guerres et de lui apprendre à dessiner. Cette trame apparemment simple donne un roman foisonnant de pas moins de 632 pages.

 

Le livre suscite un grand enthousiasme chez certains lecteurs. "C'est un très très bon roman, même s'il est aussi dérangeant. Littérairement c'est exceptionnel, l'auteur a un véritable talent et se révèle très prometteur. Que l'on soit d'accord ou pas avec ses thèses, les questions qu'il pose sont intéressantes, à savoir l'héritage des guerres passées qu'on porte tous en nous et malgré nous, à savoir la marque que l'histoire nous laisse et qu'elle laisse à la littérature." Cela ne les empêche pas de rester critiques : trop long, trop dense, ce sont des défauts classiques d'un premier roman.

 

L'extrait lu à haute voix – la neige qui dessine – confirme s'il en était besoin la qualité littéraire de l'écriture. Certains passages constituent en quelques pages une véritable nouvelle, une histoire dans l'histoire.

 

D'autres passionnés soulignent l'intérêt et la justesse des questions de fond traitées. Sans doute, l'auteur en rajoute, mais la reconstitution qu'il fait du passé colonial est d'une grande authenticité. Ce que disaient les Algériens et les Marocains les uns des autres, ce que c'était de savoir qu'on serait trahi, la question de la guerre, la question de la race, c'est pour eux du vécu. Intéressante aussi la question du mépris de l'armée : on sait ce qu'ils ont fait mais on ne veut pas le savoir. Tel père qui promène son enfant est-il un assassin professionnel parce qu'il a participé à telle guerre ? Est aussi bien rendue l'analyse de la peur, comment elle vient et comment on vit avec elle.

 

Mais tous n'ont pas été conquis. S'ils reconnaissent au roman des qualités indéniables, ils ont été agacés par le style, qualifié de prétentieux, de complaisant : "L'auteur s'est fait plaisir ("voyez comme je sais bien écrire"). Trop de descriptions, de longueurs, qui n'apportent pas grand chose à la narration." Ils jugent ambiguës les questions et la position de l'auteur, et ne parviennent pas à démêler les intentions du roman. Le lien entre les deux histoires, celle du jeune homme et celle de Salagnon le vieil officier, a pour eux un côté artificiel. Plusieurs d'entre eux critiquent assez nettement l'histoire du jeune homme, le narrateur. "A quoi sert cette histoire, c'est du commentaire ou de l'analyse psycho-sociologique, ce personnage est en dehors, il sabote son travail, il plombe le roman avec son histoire."

 

A quoi il leur est répondu que les deux personnages se ressemblent, qu'ils sont tous les deux à la marge, et que d'être lui-même en marge rend le narrateur réceptif à l'histoire de Salagnon, il voit mieux ainsi ceux qui sont en dehors du système. On n'aurait pas non plus, sans cela, les scènes comme celle de la rencontre des anciens combattants dans leur HLM, attendant derrière leurs sacs de sable – quoi ? rien, bien sûr, il ne se passera rien (la référence au Désert des Tartares est inévitable). Ce ne sont pas des scènes qui sont là pour "sauver" le roman, elles en sont partie intégrante. Enfin il n'y aurait pas les épisodes tels que le retour nocturne du narrateur, en relation avec l'une des grandes questions du roman : les dernières parcelles de l'empire colonial seraient dans les banlieues, ce qui se passe dans les banlieues serait le fruit de l'époque coloniale. Peut-être le jeune homme raconte-t-il aussi sa guerre, certes moins palpitante, mais n'est-ce pas aussi une guerre ?

 

Il y a bien sûr la solution de ne lire qu'un chapitre sur deux et d'en rester ainsi à la seule histoire du militaire, c'est ce que certains se proposent de faire, dans une lecture horizontale et diagonale selon les passages.

 

Le temps manque pour poursuivre le débat … Il faut tout de même mentionner la place importante faite dans le roman à l'opposition apparente entre guerre et esthétique, et à l'art du dessin du vieux militaire, ce qui l'a sans doute sauvé. La transmission de cet art au narrateur donne de très belles pages sur le dessin.

Bannière
Copyright © 2024 120 Grand'Rue. Tous droits réservés.
Joomla! est un logiciel libre sous licence GNU/GPL.
 

Les actus

    hiver24
Lire ...et aussi écrire plume

----------------------------- 

Mise à jour le 06/12/2024