Le point de départ de cette investigation est le personnage d'Abraham Mendelssohn, fils du philosophe Moses et père du musicien Félix, ombre entre deux soleils, banquier oublié de l'histoire. L'auteur étend sa recherche à tous les Mendelssohn, et tisse la toile de cette famille très nombreuse pour en donner le panorama. 765 vies en 460 pages, comment tient-on une telle gageure ? D'une belle plume alerte, Diane Meur alterne les vies des protagonistes avec sa propre recherche, avec le fil de la fabrication du livre, avec les doutes, les errances, les trouvailles. On se trouve devant une construction à trois niveaux : la dimension historique des Mendelssohn, des épisodes de fiction tels que des rencontres entre membres de la famille, et le processus de création du livre.

Le procédé divise les lecteurs. Les passionnés du travail de Diane Meur y ont trouvé le creuset de l'écriture et de la littérature vivantes, et une réponse aux questions fondamentales sur ce qu'est un roman, qui à leur sens doit être libéré de tout : il doit être un laboratoire d'écriture, construire le roman de demain, et rendre le lecteur actif. Le propre de ce livre est d'être interminable, au sens premier, c'est-à-dire qu'il ne devrait pas avoir de fin.

D'autres n'ont pas vraiment apprécié. Leur intérêt réel pour les personnages et pour l'histoire, entre autres celle des Juifs en Allemagne, a été dérangé par les coupures sur les recherches, d'autant que la généalogie est vaste et qu'on s'y perd facilement. "L'auteur se met au même niveau que son sujet, c'est prétentieux ; J'aurais préféré une fiction sur l'écriture, ou alors une fiction sur un membre de la famille."

Les plus nuancés ont émis des réserves sur la longueur du récit, ou encore sur le procédé, tout en appréciant la richesse, le foisonnement de la fresque dessinée par l'auteur. Diane Meur introduit en effet le lecteur à tout un univers en racontant – et elle le raconte bien – le destin des Mendelssohn.

Diane Meur est venue parler de son travail avec son éditrice Sabine Wespieser, le 7 octobre 2015 au Quai des Brumes, devant un public nombreux et attentif.