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CommentaireTout le monde connaît la figure de Spartacus. Elle est bien souvent liée à des souvenirs adolescents grâce au film de Stanley Kubrick avec Kirk Douglas, réalisé en 1960 à partir du livre de Howard Fast, publié en 1951. La publication aujourd'hui chez Agone resitue l'origine politique du livre et ses conditions d'écriture. Membre du parti communiste en plein maccarthysme, Howard Fast a en effet connu la prison pour avoir refusé de livrer des noms et c'est lors de cette incarcération qu'il a commencé à écrire Spartacus. De son propre aveu il n'a pas cherché à écrire un roman historique mais plutôt à convoquer une figure mythique de la rébellion et à se livrer à une réflexion sur l'esclavage.
Le livre s'ouvre, à une époque où l'on sent poindre la décadence, sur la vie de trois jeunes nobles romains, arrivant à la villa d'un ami après avoir vu en chemin de nombreux esclaves crucifiés. C'est à cette occasion que le fantôme de Spartacus apparaît dans les conversations, en particulier avec Crassus et Cicéron eux aussi invités dans la villa. Cicéron évoque largement la figure de l'esclave, la façon dont les Romains considèrent l'esclavage, comment ils deviennent dépendants et comment le savoir passe de l'autre côté.
C'est vif, alerte, très visuel, la langue est belle et déliée, cela donne envie de revoir le Spartacus de Kubrick et même d'autres péplums. Le propos marxiste est clair et agréablement simpliste en ces temps de perte de repères : les vilains Romains sont des esclavagistes dépravés, les esclaves sont magnifiés dans leur élan collectif vers la liberté. Là s'arrête la transposition : les esclaves ne veulent pas l'abolition de l'esclavage, ils veulent rentrer chez eux. Il n'y avait bien évidemment pas de contre modèle, et la question de la conscience de classe ne peut pas se poser dans les mêmes termes qu'aujourd'hui. Il n'empêche, Spartacus est devenu celui qui brise les chaînes de l'oppression. C'est à nous, lecteurs, d'évaluer nos actions dans le présent en regard de cette représentation.
La figure mythique de Spartacus est très bien construite par la forme même du récit : son histoire est racontée au fil des témoignages ou selon les points de vue de ceux qui l'ont connu ou en ont entendu parler, après sa mort. Il y a là comme la constitution du héros, de la légende qui se forme par l'oralité. Il reste un personnage énigmatique, flou, voire ambigu, dont l'origine fait d'ailleurs débat. Il est Thrace, donc Bulgare, et les Bulgares seraient disposés à faire de lui un prince Thrace, ce qui poserait la question de l'orthodoxie marxiste …
On peut rappeler que durant la première guerre mondiale Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht ont signé du nom de Spartacus leurs tracts clandestins et appelé Ligue spartakiste leur mouvement d'extrême-gauche révolutionnaire.
Les lecteurs ont lu avec plaisir et intérêt cette belle évocation de Spartacus, dans une reconstitution très vivante de la vie des Romains et de leurs idées. Ils ont été sensibles également à l'origine politique du livre et à son écho avec les temps présents. EventList powered by schlu.net Copyright © 2024 120 Grand'Rue. Tous droits réservés.
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