Ces onze récits, certains comiques, d’autres graves, sont des textes sans filtre, grinçants et chauds d'une fraternité et d’une ironie plutôt souriantes. L’auteur décrit avec tendresse la Russie actuelle, celle des villes aux habitants ravagés par l’alcool et la corruption, et celle des campagnes où règnent pauvreté, ignorance, superstitions d'un autre âge. Nous avons affaire à un monde abandonné de tous, sans repères, qui n'a plus beaucoup de sens depuis la chute du communisme mais dont les habitants, malgré tout, gardent l'espoir en la vie, par amour pour leur pays.

Dans une interview Zakhar Prilepine aurait déclaré que ce qui lui importe, c'est d'être à l'écoute du peuple.

La plupart des lecteurs reconnaît et apprécie l'art qu'a l'auteur de dépeindre l'ambiance glauque du pays, et la vie qui semble stagner, coincée dans on ne sait quoi. On palpe la réalité de la vie de la jeunesse dans la Russie d'aujourd'hui, à partir de situations banales du quotidien et d'événements anodins. Pour vivre il faut verser un peu de vodka chaude dans les chaussures pour qu’elles fassent moins mal aux pieds … et au caractère.

Pour les lecteurs les plus enthousiastes, ces textes sont déjà des classiques, au même titre que les recueils de nouvelles de Boulgakov ou de Zamiatine, par exemple Le pêcheur d’hommes ou, plus proches de nous, Les dernières nouvelles du bourbier d’Alexandre Ikonnikov, un contemporain de Prilepine. D'autres font état d'une lecture agréable de textes "très russes", sans pour autant en garder un grand souvenir. La majorité fait cependant état de réserves, dues principalement à la teneur et à l'inspiration inégale des différentes nouvelles. Et chacun de citer celles qui l'ont touché (parmi celles-ci est souvent cité le retour du musicien) et celles qui l'ont agacé. Une lectrice a cherché un mot qui pourrait qualifier ces textes et, pensant à "déjanté", a écrit "dégenté" … Beaucoup se sont appliqués à poursuivre leur lecture : "Je n'avais pas une envie folle de tout lire. – ça ne m'a pas franchement emballée, les premières nouvelles m'ont plu mais au bout d'un moment l'ambiance est toujours un peu la même. – C'est un peu rude, mais il y a du mouvement dans ce fleuve qui charrie plein de misères, l'humour est ravageur et on a ce côté très tranchant d'être dans une vie déglinguée."

Un lecteur assidu de la librairie, enthousiasmé par L'Archipel des Solovki, se serait étonné que ces nouvelles soient du même auteur.