Historien spécialiste du XIXe siècle en France, Alain Corbin, né en 1936, s'est particulièrement penché sur l'histoire des sensibilités. On peut citer Le miasme et la jonquille sur l'odorat, et La Pluie, le Soleil et le Vent, qui est une histoire de la sensibilité "au temps qu'il fait", une histoire de la perception des phénomènes météorologiques par les hommes.
Dans La fraîcheur de l'herbe, Alain Corbin recense la perception et les usages de l'herbe à travers la littérature, de l'antiquité à nos jours : l'herbe de l'enfance, l'herbe érotique, l'herbe des morts, l'herbe folle et l'herbe distinguée des gazons, l'herbe du sport, etc …
On peut être intrigué qu'il soit possible de faire tout un livre sur l'herbe, si banale, si évidente, si indestructible, en ce moment où il n'y en a que pour les arbres, et où l'herbe revient en force dans nos villes avec l'abandon des pesticides. On y perçoit bien l'importance qu'a cette chose si modeste, sans laquelle on ne pourrait pas vivre. C'est un livre où l'on peut piocher, qui au fil des citations réveille des sensations, et nous apprend bien des choses, par exemple la différence entre pré (fermé, avec un cours d'eau) et prairie (ouverte).
S'il n'est pas désagréable de s'arrêter dans l'herbe, le sujet est peut-être quand même trop vaste et trop intemporel pour soutenir l'attention. On n'a pas le sentiment que la perception de l'herbe a beaucoup évolué à travers les âges. "Je suis déçue par Alain Corbin qui a écrit un livre de paresseux, si on surlignait les citations, que resterait-il de lui ? ". On aurait pu s'attendre à une analyse, une enquête sur le rôle joué par l'herbe. Les citations sont en effet nombreuses et même si elles sont intéressantes, il y en a trop, et on se lasse un peu de ce catalogue.