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Commentaire
Une famille égyptienne élève l'art de dormir au rang de bien suprême. L'un des fils se prend à rêver de travailler en ville … Bien qu'attirée par le titre, une lectrice a qualifié les hommes du roman d'abominables machistes : les femmes, seules à travailler, sont traitées plus bas que terre. Celles qui voudraient s'en sortir font fuir les hommes : il faudrait se mettre à travailler et faire face aux responsabilités ! Les autres lecteurs se sont délectés de cette fable : "C'est génial, ils sont tous irrécupérables !". Il faut dire que l'auteur semble s'être bien amusé à faire cet éloge du sommeil. C'est d'une plume incroyable, pleine d'humour, de drôlerie, de grotesque, qu'il décrit cet univers confiné et qu'au final il fait tout un livre en parlant de gens qui dorment. Il suffit de se laisser faire et de s'abandonner à cette langueur orientale. La contagion a frappé certains lecteurs : "Ils me fatiguaient de leurs efforts pour passer à table". Et que dire de la scène où, le fils devant monter à l'étage voir son père qui le convoque, l'oncle doit porter son neveu dans l'escalier ? Il y en a bien un qui va s'en sortir ? se dit-on. On suit les pérégrinations de Serag sur la route poussiéreuse jusqu'au chantier abandonné de l'usine, on le regarde s'attacher à ce feu follet qu'est le gamin de la ville et résister aux avances de Hoda. Jusqu'où cela ira-t-il, va-t-il arriver en ville ? A retenir aussi cette trouvaille : le diabète serait un signe de richesse. Quant au mariage, c'est une plaie, car il apporte bruits et turbulences … (Le mariage dans les romans pourrait être un thème intéressant, suggère un lecteur.) Au-delà de la fable, l'auteur dénonce la relation au travail, ses critiques en tout cas sont sans ambiguïté : "Quand un homme te parle de progrès, il veut t'asservir". La vie d'Albert Cossery est en cohérence avec son propos. Né en Egypte, il a habité toute sa vie dans une chambre d'hôtel à Paris, plutôt seul, racontant des histoires incroyables sur ses origines dans les bistros où il avait ses habitudes, ne répondant pas à son éditeur qui lui demandait de nouveaux livres. Il a promis à deux cents libraires d'aller les voir et n'est jamais allé nulle part, dans sa hantise de sortir de sa chambre d'hôtel. Au Magazine Littéraire il aurait déclaré avoir plein d'idées et … la flemme.
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