Journal intime
Ecrire un extrait du journal intime d'un animal (texte d'une demi-page).
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Texte C.B. – 04/09/2018
22 septembre, 19 heures :
Non, mais quelle aventure !... Bon, la route était déserte, pas de bruit de moteur, ni à gauche, ni à droite… Je me suis dit allons-y. De toute façon, même s’ils foncent, les crétins pressés qui s’emmerdent à traverser la forêt sur ces routes toutes droites, ils ont qu’à s’arrêter. C’est toujours ce qu’ils font d’ailleurs quand j’arrive pour traverser. Les freins hurlent, les pneus dérapent sur les bas-côtés, toujours plus loin vers les fourrés. C’est pour ça que je me blesse le groin avec les gravillons qu’ils font gicler évidemment là où je trouve les meilleures racines et les champignons moelleux sous les feuilles. Et que j’t’envoie des « Oh, tu as vu ? Un sanglier !... », « Attention, regarde là, derrière le tronc ! », « Il va traverser sans regarder ! ». Et encore : « Qu’est-ce qu’il est gros celui-là ! Heureusement qu’on l’a vu à temps. Tu imagines la bosse ?! Il serait même capable de nous crever le radiateur avec ses défenses… » Et tutti quanti. Ils ne savaient pas si bien dire…
J’en ai un peu marre de cette sale réputation qu’ils m’ont donnée : moi, un voleur de choux ?! Non, mais qu’est-ce qu’ils croient ? Il y en a que pour leurs sales jardins, ou leurs champs à perte de vue, où il y a pas moyen de se cacher pour bouffer en paix ! Comme si j’avais le choix ! C’est sûr, les glands, c’est bien meilleur, plus parfumé, croquant et tendre à la fois… Pas comme ces horreurs qui puent sur pieds après récolte et de toute façon, mettent de la tempête dans le ventre dès qu’on les digère. Non, je ne suis pas un mangeur de choux, messieurs, il n’y a que les vrais chasseurs qui le savent, ceux à qui je fais un pied de nez chaque dimanche quand ils viennent me chercher…
Mais là, je me suis fait méchamment avoir. Voilà un combi peint en jaune vif qui arrive en ronronnant gentiment, tout loin là-bas. J’étais encore à 100 mètres derrière les sapins. Je me suis dit que j’avais largement le temps, hein, avec ces vieux soixante-huitards rêveurs, au bout du rouleau, à rouler tout lentement pour pas polluer et surtout user moins d’essence… Eh ben, non, cette fois j’ai raté mon coup. Au moment où je débouchais entre les orties du fossé pour franchir au petit galop la chaussée, paf ! ils étaient là, direct devant mon nez et je me suis retrouvé à leur défoncer la porte coulissante… Après, ils m’ont couché à l’arrière, sur la bâche de leur remorque. Ils pensaient que j’étais mort. Mais je me suis dépêché de leur tirer ma révérence et de filer fissa, ni vu ni connu, au prochain tournant qui m’a aidé à basculer sur la route. Ouf ! Qu’est-ce qu’on va rigoler avec les copains quad je vais leur raconter !...
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