C'est toujours une surprise de découvrir au fil de la soirée les textes proposés par les lecteurs d'un soir. Ils nous ont lu leur choix avec beaucoup de sensibilité et nous ont fait partager émotion, humour, plaisir, poésie, mystère des livres et des mots. Petite nouveauté cette année, les lecteurs qui le souhaitaient ont expliqué les raisons de leur choix. Il est bien difficile toutefois de restituer la chaleur et la délicatesse de leur propos.
Les textes lus sont extraits des livres suivants, accompagnés de quelques précisions permettant de situer les oeuvres :
- Le livre de sable. José Luis Borges. Trad. françoise Rosset. Ed. Folio
L'univers fantastique de Borges constitue l'aboutissement d'une recherche, d'une esthétique, d'une problématique conduisant à la découverte d'un style serein, associé à une situation fantastique. Jorge Luis Borges (Buenos Aires, 1899 - Genève, 1986) est l'une des têtes illustres de la littérature universelle qui, par ses vibrantes déclarations antidémagogiques, s'attira la grâce de ne pas recevoir le prix Nobel.
- Le mot. Victor Hugo.
"Tenez, il est dehors ! Il connaît son chemin; Il marche, il a deux pieds, un bâton à la main, De bons souliers ferrés, un passeport en règle; Au besoin, il prendrait des ailes, comme l'aigle ! Il vous échappe, il fuit, rien ne l'arrêtera;"
- Le temps pour rien. Thierry Paquot. Petits plaisirs de la paresse. Autrement.
Thierry Paquot, philosophe, professeur des universités (IUP-Paris XII), est l'auteur de nombreux ouvrages, dont L'Art de la sieste (Zulma, 1998), ouvrage qui a connu un grand succès et a été traduit en plusieurs langues. Il collabore au Monde Diplomatique, au Magazine Littéraire, à Esprit. Il est aussi éditeur de la revue Urbanisme et producteur sur France Culture. La sieste est une halte salutaire qui réconcilie avec soi-même. Elle appartient à un art de vivre que l'urbanisation planétaire tend à supprimer. Ce court essai est un plaidoyer pour une maîtrise de l'emploi du temps de chacun, pour la reconnaissance d'un temps pour rien, mais un rien d'une valeur inestimable.
- Mental. Kââ. Ed. Fleuve Noir (épuisé)
M. Cinquante a plusieurs passions : le bridge, la bonne chère et les femmes. Il a également un solide métier : tueur à gages. Rien d'étonnant donc à ce qu'on lui confie un contrat sur un dénommé Mental. Lorsque l'hypothèse la plus improbable surgit, une étrange complicité s'accomplissant entre les deux hommes, on peut crainde le pire. Et le pire survient... Comme le proclame le héros de ce roman décapant : L'avantage de la haine est qu'elle vous rend votre sang-froid absolument intact. Cristallisé en somme. Kââ enseigne la philosophie en Bretagne. Il est l'auteur de plusieurs romans policiers parus au Fleuve Noir, dont Trois chiens morts (1992), Le marteau (1994) et récemment On a rempli les cercueils avec des abstractions (1997). Passionné d'armes à feu modernes et de gastronomie intelligente, Kââ est une valeur sûre du roman noir français. Mental, publié pour la première fois en 1984, est considéré comme son chef d'oeuvre.
- Passages. Henri Michaux. Ed Folio.
"Dès que j'écris, c'est pour commencer à inventer. A peine est-ce sorti, voilà que je me mets de tous côtés à lui présenter des barreaux de réalité et, ce nouvel ensemble obtenu, à lui en présenter de nouveaux encore plus réels, et ainsi, de compromis en compromis, j'arrive (...) à ce que j'écris qui est de l'invention saisie à la gorge."
- La flamme d'une chandelle. Gaston Bachelard. Ed. PUF
Bachelard analyse ici la flamme, qu'il qualifie d'un des plus grands opérateurs d'images parce qu'elle force l'homme à imaginer, sous des aspects philosophique, poétique, esthétique ou encore littéraire. Il humanise la flamme et la fait centre de toute demeure, un être familial gardien des souvenirs. Philosophe et épistémologue, Gaston Bachelard (1884-1962) fut professeur de physique et chimie puis de philosophie, avant d'assumer à la Sorbonne la direction de l'Institut d'histoire des sciences et des techniques. Ses recherches ont ouvert la voie à une nouvelle forme d'interrogation sur la science en instaurant l'erreur et non plus la vérité, l'imagination et non plus la raison au centre de la réflexion épistémologique.
- Le livre de l'intranquillité. Fernando Pessoa. Trad. Françoise Laye. Ed. Bourgois.
Ce journal de bord d'une vie spirituelle, dont la richesse est exceptionnelle, est aussi la chronique des travaux et des jours d'un homme tout à fait ordinaire. Et c'est cette description du néant de la vie quotidienne qui fait de ce livre de Pessoa un chef d'oeuvre. Fernando Pessoa est né à Lisbonne le 13 juin 1888. Son père est décédé lorsqu'il avait cinq ans et, entre 1896 et 1905, il a vécu à Durban, en Afrique du Sud, où le second mari de sa mère exerçait les fonctions de Consul. De retour au Portugal, il n'a guère quitté Lisbonne, où il est mort le 30 novembre 1935, pauvre et méconnu du grand public, malgré son rôle incontesté de chef de file du modernisme portugais et l'importance, qualitative et quantitative, de ses collaborations aux revues littéraires de l'époque.
- On s'est déjà vu quelque part. Nuala O'Faolain. Ed. 10/18
Née en Irlande dans les années quarante, Nuala O'Faolain est désormais un auteur internationalement reconnu. Elle partage son temps entre l'Irlande et New York. En France, ses livres sont publiés par Sabine Wespieser éditeur. Devenue une journaliste reconnue à l'Irish Times, Nuala O'Faolain livre son parcours, ses doutes, ses enthousiasmes, ses excès, ses souffrances et ses passions. Un récit autobiographique qui parle avec simplicité et humour d'une éducation irlandaise sur fond de féminisme et de combats politiques.
- "Un jour". La ville est un trou suivi de Un jour. Charles Pennequin. Pol
Les poèmes de C. Pennequin sont faits d'une véhémence qui trouve sa force dans une colère et une indignation à la fois sociale, syntaxique et philosophique.
- "La fugue de mort". Pavot et mémoire. Paul Celan. Trad. Valérie Briet. Ed. Bourgois
Né à Czernowitz en Roumanie en 1920, mort à Paris en 1970, Paul Celan est l'auteur de neuf recueils de poèmes, dont Pavot et Mémoire, De seuil en seuil et Grille de parole, qui lui valurent le prix Georg Büchner en 1960. Ce sont les premiers poèmes de Celan. La langue allemenade y était déjà travaillée comme une matière, mais qu'il laisse encore chanter jusqu'à rejoindre des effets proprement musicaux.
- La garde-robe. Idelette de Bure. Ed Arléa (à paraître)
Et si le meilleur moyen de parler d'une femme était de faire l'inventaire des vêtements qu'elle a portés ? Ces étoffes, ces drapés, l'impeccable tombé d'une robe en apprendraient-ils plus sur leur propriétaire que de longues confidences sur sa vie ? C'est ce que semble penser Idelette de Bure, qui entrouvre pour nous son armoire intime, ne gardant que les vêtements emblématiques et originaux, ceux qui fixent pour toujours un moment heureux, un amour enfui, une angoisse passagère. La plongée dans cette mémoire de chiffons nous entraîne tour à tour dans une île grecque, dans un quartier du nord de Londres ou dans les rues de Paris, mais aussi à Venise, dans les Alpes suisses ou dans le jardin d'une maison de vacances. Tous ces lieux sont ceux d'une vie, la vie d'une femme joyeuse ou mélancolique, amoureuse ou solitaire, qui se dévoile à nous en nous donnant à voir ce qui la pare. Idelette de Bure est l'auteur de Rouge ou la proie du peintre dans la collection "L'un, l'autre" de Gallimard. Elle vit à Neuilly.
- Et mon coeur transparent. Véronique Ovaldé. Ed de l'Olivier
Irina Rubinsteint trouve la mort dans un accident de voiture au fond de la rivière Omoko. Son mari, Paul, perd à la fois l'amour de sa vie et ses illusions, car Irina était censée être en voyage et la voiture qu'elle conduisait ne lui appartenait pas. Le père d'Irina, que Paul croyait mort, refait surface, et Paul trouve dans les affaires de sa femme un manuel de fabrication de bombes artisanales. Véronque Ovaldé nous entraîne dans le tourbillon de son imagination et nous offre un roman noir en trompe-l'oeil. De livre en livre, elle bâtit son univers, qu'elle habite par sa fantaisie et son goût pour le merveilleux. Les histoires qu'elle raconte sont de celles que l'on ne trouve que dans les livres.
Est rappelée l'importance de la traduction, véritable ré-interprétation du texte d'origine. A preuve le besoin de retraduire régulièrement les oeuvres, et les différences entre deux traductions d'une même oeuvre à vingt ans d'écart par exemple.
La soirée s'est terminée très agréablement autour d'une galette, partagée avec une reine imprévue ...
Merci à tous, lecteurs et auditeurs, pour cette belle soirée.
Nous vous rappelons les dates des prochains événements :
mardi 29 janvier à 19h15 - assemblée générale de l'association 120 Grand'Rue
mardi 26 février à 19h15 - club de lecture autour de :
Dolce Agonia, Nancy Huston - Art, Yasmina Reza - Pour un oui ou pour un non, Nathalie Sarraute - Mon ange, Guillermo Rosales
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