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CommentaireLaurent Mauvignier a présenté son livre le mois dernier au Quai des Brumes, on pouvait encore à ce moment-là espérer le Goncourt pour ce roman très remarqué. Car il s'agit bien d'un roman et non d'un témoignage, comme l'a réaffirmé l'auteur, qui a écrit ce livre à partir du silence de son père au sujet de la guerre d'Algérie. On ne peut qu'être étonné d'apprendre que Laurent Mauvignier a 42 ans et qu'il n'est jamais allé en Algérie. Il s'est inspiré de la boîte de photos que conservait son père et a complété ses sources par des recherches documentaires. Est-ce l'art de l'auteur d'évoquer cette guerre ? Est-ce la chape de plomb du silence qui s'allège ? Toujours est-il que le livre suscite de nombreux commentaires et témoignages. Qui n'a pas été touché de près ou de loin par les "événements" ? Par le silence, par l'interrogation sur le sens ce cette guerre, par la proximité de la deuxième guerre mondiale (le massacre de Sétif a eu lieu le 8 mai 1945), par le rapatriement en 1962 ? Les témoignages les plus touchants sont ceux des anciens appelés : "c'est très juste". Ou encore celui de cette jeune femme de mère algérienne, à qui le livre a permis de mieux connaître l'histoire, en complément du témoignage de sa mère. Le roman commence par une fête de famille dans une ambiance mitigée, à la fois gaie et mélancolique. Tout le monde est surpris de voir Feu-de-Bois offrir à sa sœur une broche, cadeau de valeur sans rapport avec ses moyens, lui qui est revenu vivre en sauvage dans son village. Cet événement déclenche l'engrenage de la mémoire, qui va mener Feu-de-Bois à agresser un voisin arabe et Cabut, le cousin, le narrateur, à remonter dans ses souvenirs. Souvenirs d'enfance et souvenirs de la guerre d'Algérie. Car le récit superpose et entremêle l'histoire individuelle et collective, en montrant l'impact de la guerre sur des vies ordinaires. "Ce n'est pas un livre sur la guerre d'Algérie, c'est bien plutôt un livre sur des caractères, des blessures, des gens, un village", dit un lecteur. La façon dont la guerre continue à détruire des hommes déjà mal dans leur peau est très bien décrite dans le personnage de Bernard (car Feu-de-Bois a un prénom), personnage dur, complexe, ambigu, comme le montrent ses relations avec sa mère et son attitude à la mort de sa sœur. C'est aussi un livre qui traite avec justesse du silence et des ravages qu'il provoque. L'écriture très particulière de Laurent Mauvignier – déjà appréciée dans Loin d'eux – traduit la pensée qui erre par des phrases laissées en suspens, quand les personnages ne peuvent pas aller au bout de leurs pensées ou exprimer leurs sentiments. Elle donne ainsi beaucoup d'intensité au récit et immerge le lecteur dans l'ambiance. La belle construction en quatre temps (après-midi, soir, nuit, matin) joue avec les changements de style : monologues intérieurs pour le temps présent, narration pour les souvenirs de la guerre qui reviennent Un grand roman.
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